Comment étaient disposés les linges ?

Si vous avez déjà lu le passage relatif à la découverte du tombeau vide dans la Bible, vous avez certainement dû être interpellé sur le manque de clarté relatif à la découverte du linceul.

Jean 20, 6-7 :

« Simon-Pierre, qui le suivait, arrive à son tour. Il entre dans le tombeau, et il regarde le linceul resté là, et le linge qui avait recouvert la tête, non pas posé avec le linceul, mais roulé à part à sa place. » (traduction liturgique)

Il existe plus d’une dizaine de traductions de la Bible pour ce passage ; celle-ci synthétise bien les différentes versions et leurs complexités :

Ainsi, comprenez-vous ce passage : « roulé à part à sa place » ?

Moi non… Car lu ainsi et sans la compréhension des différents tissus, il ne veut rien dire ; et surtout, pourquoi préciser qu’il est « roulé » ?

Pour bien comprendre, il faut étudier directement le texte grec :

« ἔρχεται οὖν καὶ Σίμων Πέτρος ἀκολουθῶν αὐτῷ,

καὶ εἰσῆλθεν εἰς τὸ μνημεῖον·

καὶ θεωρεῖ τὰ ὀθόνια κείμενα,

καὶ τὸ σουδάριον, ὃ ἦν ἐπὶ τῆς κεφαλῆς αὐτοῦ,

οὐ μετὰ τῶν ὀθονίων κείμενον

ἀλλὰ χωρὶς ἐντετυλιγμένον εἰς ἕνα τόπον. »

En grec, un mot signifie plusieurs choses et la grammaire donne le sens, ce qui explique les nombreuses traductions différentes.

La traduction la plus fidèle au texte grec est celle de Soeur Jeanne d’Arc (DDB 1992) :

« Simon-Pierre vient donc aussi, en le suivant, et entre dans le sépulcre. Il remarque les linges là, à plat. Et le tissu qui était sur sa tête n’est pas à plat avec les linges, mais enroulé, lui, en place. »

Quel est donc ce mystérieux « tissu enroulé » qui contraste avec les linges à plats ? Pourquoi une telle précision ?

Il y a au moins trois types de tissus : Le linceul qui enveloppe le corps, les bandelettes qui lient le linceul avec le corps, et le « tissu qui était sur sa tête ».

Aussi suivant les traductions, ce mystérieux tissu peut désigner deux pièces différentes :

  1. Un linge qui aurait recouvert le visage de Jésus lors de son transport jusqu’au sépulcre, et qu’on associe au suaire ou soudarion d’Oviedo. Il est probable que ce suaire ait également été déposé dans le tombeau, dans un autre endroit que le corps. Plusieurs correspondances ont d’ailleurs été établies entre le suaire d’Oviedo et le linceul de Turin (cf. article suaire d’Oviedo). Toutefois le terme « enroulé » n’apporte pas grand-chose dans ce cas.
  2. Une mentonnière qui était placée sur la tête et enroulée autour du visage du défunt afin de maintenir la bouche fermée. Le linceul de Turin met également en évidence la présence d’une mentonnière, par l’absence d’image entre les joues et les cheveux, et sur le dessus de la tête… On pourrait assimiler ce linge à la Sainte Coiffe de Cahors, tout comme au linge représenté sur le reliquaire de la Pierre détachée du sépulcre (cf. article sur cette Sainte Coiffe). Dans ce cas, le terme « enroulé » prend tout son sens car apporterait un relief au linceul à plat.

Une analyse très approfondie du texte grec, aboutit à la traduction verbatim suivante (travaux de C. Fricoteaux, 2010 et 2015) :

« Arrive donc aussi Simon Pierre, le suivant ; il entra dans le tombeau et il « examine-contemple » les linges de fine toile de lin à plat, et aussi le soudarion qui était sur sa tête, non pas à plat entre les linges de fine toile de lin, mais distinctement enroulé dedans, exactement en place. »

Cette nouvelle traduction semble mettre en évidence que ce soudarion serait la mentonnière.

On notera aussi que le terme soudarion est également utilisé dans le texte relatif à la résurrection de Lazare.

Vous l’aurez compris, on peut expliquer le manque de clarté de certaines traductions par l’ambiguïté autour du tissu désigné (mentonnière ou suaire du visage), mais cela n’enlève rien au fait que ces deux tissus semblent bien avoir été présent dans le sépulcre, et exactement à leurs places respectives.

Ainsi, on peut aisément reconstituer la mise au tombeau : Jésus est décroché de la croix, son visage est recouvert d’un suaire, son corps est transporté jusqu’au tombeau, puis le suaire du visage est retiré, une mentonnière est positionnée sur (autour) la tête puis le corps est mis dans le linceul et est attaché avec des bandelettes. Il est ensuite déposé dans le sépulcre avec probablement le suaire du visage imprégné de sang mais dans un autre endroit du sépulcre.

Lorsque les apôtres arrivent au tombeau, ils découvrent donc le linceul, les bandelettes nouées, ainsi que le relief de la mentonnière dans le linceul. Et probablement le suaire du visage. Tout était en place tel que le corps de Jésus fut déposé mais sans le corps !

L’apôtre Jean, qui était resté au pied de la croix et qui a donc certainement participé à la mise au tombeau avec Joseph d’Arimathie, a encore en tête chaque détail ; il entre à la suite de Simon-Pierre dans le tombeau et est certain que rien n’a bougé.

On comprend alors pleinement le verset suivant (Jn 20, 8) :

« C’est alors qu’entra l’autre disciple, lui qui était arrivé le premier au tombeau. Il vit, et il crut. »

B.M

PS : Des images ci-dessous issues de la BD de Brunor (ww.Jésus qui ?) permettent de se faire une idée de ces différents tissus.

 

 

 

Planche de Brunor

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